Kasaï-Oriental : le fauteuil de gouverneur, un privilège ou un cadeau empoisonné ? (Tribune de Freddy Kabuya)

Le profil d’un candidat désigne l’ensemble des qualités personnelles et professionnelles qui le rendent apte à exercer une fonction donnée. Au Kasaï Oriental, après plus de quatre passations de pouvoir à la tête de la province sous le mandat du président Félix Tshisekedi, il apparaît clairement que la province n’a toujours pas bénéficié d’un gouverneur véritablement qualifié. Entendons par là : une personnalité intellectuellement outillée, moralement irréprochable, incorruptible, vertueuse, consciencieuse et, surtout, dotée d’un véritable sens de l’État.
Cette situation, devenue récurrente, s’apparente à une tragédie politique. À chaque élection, le candidat semble être soit la créature d’un individu influent à qui il doit sa nomination et sa gestion, soit le bénéficiaire d’un arrangement entre groupes d’intérêts à qui il devra, une fois élu, redistribuer des faveurs.
Les mêmes causes produisant les mêmes effets, la province s’enfonce dans un chaos permanent, provoqué non seulement par les manœuvres dilatoires des familles politiques, mais aussi par de simples conflits d’intérêts entre les élus eux-mêmes lors du processus de désignation du gouverneur.
Dès lors, il est urgent de repenser le profil du candidat gouverneur, dans toutes les provinces en général, et au Kasaï Oriental en particulier, où la population est aujourd’hui prise entre le marteau et l’enclume : on ne sait plus qui gouverne , ni même qui détient réellement le pouvoir.
Un plan d’action, quant à lui, est souvent une fiction. Rarement issu de la vision propre du candidat, il est plutôt le produit de son entourage, qui élabore des stratégies fondées sur des analyses sociologiques, géopolitiques et tactiques. Ces plans sont parfois personnalisés, parfois calqués sur des modèles obsolètes, ayant fonctionné ailleurs dans d’autres contextes.
Le plus grave, c’est que ces « créateurs de candidats » tiennent absolument à être récompensés une fois leur poulain élu. Le pouvoir devient alors pour eux un butin politique, marqué par leur influence et leurs intérêts.
Ce qui inquiète particulièrement, c’est que dans les discours de campagne des candidats gouverneurs du Kasaï Oriental, *aucun ne semble aborder un enjeu crucial : la problématique des concessions de la MIBA* (Minière de Bakwanga), souvent envahies avec la complicité ou l’indifférence des autorités politiques en place.
Or, il faut rappeler que :
– Les concessions de la MIBA représentent 80 % de la participation de l’État dans cette entreprise stratégique ;
– Le Chef de l’État a manifestément pris l’engagement clair en faveur de la relance de la MIBA, notamment en annonçant, lors de sa visite d’itinérance en décembre 2024, un financement de 50 millions de dollars pour redémarrer les activités minières ;
– La SACIM, qui exploite actuellement la kimberlite de Tshibue, doit rétablir la MIBA dans ses droits en tant que propriétaire légitime des gisements.
Alors, quelle sera la position du prochain gouverneur du Kasaï Oriental face à la protection des concessions foncières et minières, dans le respect de la loi Bakajika qui stipule que le sol et le sous-sol appartiennent à l’État ?
Le prochain gouverneur saura-t-il gouverner autrement, dans le respect de la loi et de la vision présidentielle visant la réhabilitation de la MIBA, considérée comme une solution phare pour le développement de l’espace Grand Kasaï ?
Force est de constater que la plupart des candidats semblent avoir évité ou négligé cette question pourtant incontournable dans le contexte actuel. Et pourtant, elle conditionne en grande partie l’avenir économique et social de la province.
C’est pourquoi, le prochain gouverneur ne pourra l’ignorer. Il devra inévitablement se positionner sur cette problématique fondamentale. Car, comme dit l’adage : un homme averti en vaut deux.
Rédaction