RDC : Le ministre de la Justice Constant Mutamba livré à la justice pour suspicion de détournement de fonds

L’Assemblée nationale de la République démocratique du Congo a autorisé, ce jeudi, l’ouverture d’une instruction judiciaire contre le ministre d’État en charge de la Justice et garde des Sceaux, Constant Mutamba, à la suite de graves allégations portées contre lui par le procureur général près la Cour de cassation.
Cette décision est intervenue après la lecture et l’adoption du rapport de la Commission spéciale chargée d’examiner le réquisitoire du procureur général Firmin Mvunde. Ce dernier sollicite une autorisation de poursuites contre le ministre, dans une affaire de détournement présumé de 39 millions de dollars américains, initialement destinés à la construction d’une prison à Kisangani, dans la province de la Tshopo.
Lors de son audition, le procureur général a accusé le ministre de la Justice d’avoir exercé une pression « forte » et des menaces à l’encontre de la directrice générale adjointe de la Direction Générale du Contrôle des Marchés Publics (DGCMP). Objectif : obtenir l’approbation d’un marché public attribué à une entreprise dont l’existence n’est attestée qu’à partir de 2024.
Le magistrat a également souligné que le ministre aurait ordonné le décaissement de la totalité des fonds sans respecter les étapes requises, notamment l’aval préalable de la Première ministre, Judith Suminwa, qui n’aurait jamais été donné à ce jour.
En réponse à ces accusations, Constant Mutamba a fermement nié les faits, dénonçant une manœuvre politique orchestrée par le procureur général, qu’il accuse de corruption et de vouloir l’éliminer en raison de sa politique de réforme de la justice.
« Je suis victime d’un complot. Mon combat contre la tricherie et la cupidité dérange les mafias installées au sommet de l’appareil judiciaire », a déclaré le ministre devant la Commission.
Malgré cette ligne de défense, l’Assemblée nationale a voté en faveur de l’autorisation de l’instruction judiciaire, ouvrant ainsi la voie à des poursuites formelles contre un membre en fonction du gouvernement. Il s’agit d’une décision historique qui, selon plusieurs observateurs, témoigne d’une volonté politique de renforcer la redevabilité et de rompre avec l’impunité des hautes autorités.
Ce dossier, désormais entre les mains de la justice, s’annonce comme un test crucial pour l’indépendance du pouvoir judiciaire congolais à l’ère des promesses de réforme et de bonne gouvernance.
Jonathan Madika